2ème personne qui témoigne pour cette semaine spéciale témoignage de bipotes sur Le Bipolaire . Et, on n’a pas fait exprès, c’est encore une personne qui se prénomme Sandrine ! Elle a déjà 10 ans de maladie derrière elle, un diagnostic un peu long à venir après plusieurs dépressions et des périodes d’hypomanies qui passaient quasi-inaperçues … Perte d’amis, incompréhension de la famille, vie professionnelle compliquée, elle nous raconte sa vie, celle qui est affectée par la maladie …

 

Je suis lucide face à ma bipolarité

Je m’appelle Sandrine, j’ai été diagnostiquée comme souffrant du syndrome bipolaire lorsque j’ai eu 36 ans, cela fait donc 10 ans maintenant. Au départ je ne connaissais pas du tout cette maladie, je souriais même, je pensais bêtement que la bipolarité était liée aux changements de saisons.
Avant, j’avais été soignée pour des dépressions, mais les phases hypomaniaques n’avaient pas été reconnues car je n’avais pas de suivis psychiatriques réguliers.
Il a fallu deux ans de suivis hebdomadaires pour le diagnostiquer. Au départ, j’avais décidé de faire une thérapie pour des problèmes liés à l’enfance qui, je pensais, avaient causé mes dépressions, mes tentatives de suicide et ma faiblesse avec l’alcool durant plusieurs années avant que je tombe enceinte.

 

Mon diagnostic vu par mes proches

Lorsque le verdict a été rendu, je l’ai tout d’abord annoncé à ma famille proche, donc ma mère. Elle ne m’a pas cru, une forme de déni je pense, ce qui ne m’a pas aidé à prendre conscience des vraies conséquences de la maladie. Je vivais seule avec mon fils alors âgé de 8 ans, il a vécu ma dernière dépression qui était toujours plus ou moins constante jusqu’à ses 16 ans. Cela a été difficile pour lui. Nous étions seuls tous les deux.
Mon psychiatre à l’époque avait contacté ma mère pour lui expliquer que je ne fabulais pas, mais elle a nié l’importance de cette maladie pendant quelques années encore. Par la suite, j’ai été hospitalisée en clinique psychiatrique. Des réunions d’information m’ont permis de mieux comprendre le fonctionnement de la bipolarité et de prendre conscience moi-même des dangers et des obligations à tenir quand on en souffre. J’ai souffert du manque d’intérêt de mes proches; mon ex, le père de mon fils, pense que je suis une malade imaginaire encore à ce jour, et que j’allais en club de vacances à chaque hospitalisation. Pour la famille plus lointaine du côté de mon père, ça a été le rejet et l’indifférence. Je n’ai plus aucun contact avec eux. Les amis se sont éloignés quand j’ai commencé à dépérir et à ne plus me contrôler dans une phase dépressive très importante.

 

Une vie professionnelle compliquée

J’en viens à ma vie professionnelle, je venais travailler complètement shootée par mes médicaments à des doses importantes, puis je suis passée en invalidité catégorie 1 dans un premier temps et je travaillais donc à mi-temps. Mes capacités et mes connaissances ont commencé à se détériorer : problème d’organisation, de mémorisation et troubles de la mémoire, de rapidité, ce qui empirait l’estime que j’avais de moi-même et le regard extérieur des collègues et responsables qui ne comprenaient pas et ne cherchaient pas à comprendre. Je me suis donc murée et ai vécu une exclusion totale. Un jour, je suis allée au travail, et au moment de sortir de ma voiture, j’ai commencé à me diriger vers mon lieu de travail, mais j’ai craqué et j’ai fait demi-tour. Il a fallu trois années par la suite pour que ma maladie soit reconnue par le système et que je sois prise en invalidité catégorie 2, mais entre temps, mon médecin me faisait des arrêts maladies; étant conscient de la dangerosité pour moi de retourner sur mon lieu de travail.
À ce jour, je ne travaille plus, et je gère ma maladie au jour le jour. J’ai mûri et je m’intéresse, m’informe non seulement sur la maladie, mais aussi sur mon traitement. La posologie, les rôles, les effets secondaires et les interactions. Il m’arrive cependant encore quelquefois de me retrouver en panne deux ou trois jours, mais ce n’est pas bien.

 

La gestion de mon budget

Depuis trois ans à peu près, je suis plutôt en phase maniaque et hypomaniaque, surtout ces derniers mois. J’ai du mal à gérer mon budget, je ne sais même plus faire mes comptes, et j’ai fait beaucoup d’achats compulsifs, des petits montants, des gros, mais cumulés cela fait une très grosse somme.

Une anecdote par exemple, j’ai payé des cours par correspondance, imputant donc une somme d’argent assez importante, mais je ne suis pas allée au bout de cette formation à domicile, perdant tout motivation du jour au lendemain.

 

Comment je vois mon avenir avec mon trouble bipolaire ?

Aujourd’hui, je sais que je suis bipolaire depuis dix ans, mon traitement de mes troubles bipolaires est encore un peu difficile à stabiliser.
Je ne pense pas trop loin concernant mon avenir, il est difficile pour moi de me projeter à long terme, je me fixe donc des petits objectifs, même si la moitié d’entre eux sont des projets irréalisables, je les écris, et j’essaye d’en accomplir quelques uns.
Je suis de nature très optimiste donc je vois plutôt un bel avenir, j’ai la chance d’être accompagné par un homme compréhensif qui prend ma maladie au sérieux. Ma mère, à ce jour, comprends mieux aussi et s’y intéresse, et enfin mon fils âgé de 18 ans me connais bien et connais mes réactions.
Parallèlement, j’essaye aussi de me reconstruire, j’ai développé des phobies, peur de la foule, peur d’être seule dans la rue, peur de conduire, bref j’ai encore beaucoup de travail et je sais pertinemment que je ne retrouverai pas toutes mes facultés.

On ne guérit pas de cette maladie, on n’est jamais à l’abri d’une rechute, que ce soit dans une phase dépressive ou une phase maniaque. Il ne faut pas arrêter son traitement parce qu’on croit que l’on va mieux, et un suivi psychiatrique est vraiment nécessaire. Il faut s’informer, il y a une prise en charge personnelle très importante, il faut s’accepter et en prendre son parti. On ne guérit pas, mais on apprend à vivre avec le plus confortablement possible.

 

Témoignage sur ma bipolarité
Bipolaire depuis 10 ans
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  • Bonjour
    J’ai lu votre récit,et j’ai trouve beaucoup points de coma.Moi aussi 10 ans de maladie et malgré des expériences y a toujours coté obscure de maladie qui ma fait énormément mal.Des crises d’angoisse assez souvent.Etats maniaque heureusement j’ai presque effacé des achats compulsive etc etc…bref je lutte comme je peux.

    • Merci David pour ton témoignage, je crois que nous vivons notre maladie différemment mais les point commun entre nous sont très similaire. Mais c’est un combat quotidien.

  • Bonjour à tous,

    Je suis mariée depuis plus de 37 ans avec un homme que je croyais « normal », depuis environ 6 ans je me suis aperçue que quelque chose « cloché », il est vrai que pendant des années, alors qu’il travaillait et était cadre supérieur, je pensais que tout était lié à sa profession, du stress et à la proximité toxique de sa mère. Tout s’est dévoilé lorsque après avoir voulu monter sa propre entreprise, dont il n’était pas capable de mener à bien, c’est alors que le piège s’est refermé sur lui et surtout sur moi, qui n’était pas au courant de tous les crédits et les mensonges…. A l’heure d’aujourd’hui après près de 7 mois d’hospitalisation en milieu psychiatrique, une tentative de suicide, et un oreiller sur ma tête plus tard…., il suit une psychothérapie, il parle rarement de choses existentielles, comme coupé du monde. Notre vie de famille a volé en éclats, certaines personnes malveillantes de notre entourage doivent se régaler de tout cela, cela s’appelle le syndrome de « shadenfreud », je souhaite à toutes et à tous un bon courage, car il en faut.