Bonjour à toi qui me prête ton épaule sans me juger
Je suis Tcheupel, 47 ans et bipo depuis toujours. N'oublions pas que ce mal qui nous envahit est congénital. Je me considère être né avec "un pet au casque" plutôt qu'être "né coiffé".
Durant mon enfance j'ai longtemps été morose, je cherchais constamment la contradiction et le conflit avec mon entourage (va savoir pourquoi...?). Je ne comprenait pas leurs mécanismes de fonctionnement. Je me sentais à part. Toujours en marge de la pensée dominante.
Dès mes 16 ans j'ai commencé à consommer du cannabis et voyant que je me sentais soulagé, j'ai continué à en prendre jusqu'à ce jour. Le jour de mes 18 ans, une violente dispute avec mon père m'a fait basculer dans le noir profond. Et jusqu'à mes 24 ans nous n'avons plus échangé de mots.
J'ai l'intime conviction qu'à partir de cette période, mon "Ours" mal intérieur commençait à prendre le dessus.
Le drapeau français m'appelant à la majorité, j'en ai profité pour m'engager. Mon fort caractère m'a entraîné dans des aventures rocambolesques et très dangereuses pour certaines. À 20 ans j'ai même évité la prison militaire. 3 années d'apprentissage de la vie à la dure. Puis de retour au bercail, je me suis empressé de trouver un job pour prendre mon indépendance. Rapidement livré à moi-même, c'est là que mon histoire a prit un Tournent.
Je ne gérait plus rien de façon rationnelle. J'enchainait les relations amoureuses, les déménagements, les boulots saisonniers et les longs voyages. J'étais complètement instable.
En 1997, à la suite d'une grosse dépression dû a une énième rupture sentimentale, mon médecin traitant m'a diagnostiqué "Maniaco-dépressif".
Puis quelques années plus tard en 2000 j'ai ouvert un commerce sur un coup de tête. Il m'a fallu décupler une énergie folle pour ce projet si bien qu'une fois la porte de la boutique ouverte, les forces me manquait pour mener à bien mon entreprise.
3 ans plus tard j'ai dû mettre la clef sous la porte et me suis retrouvé sur-endetté.
Il a fallut me battre encore plus pour payer mes dettes. Je ne dormais plus, j’enchainais 2 job à la fois et je n’arrivait pas à voir le bout du tunnel.
La pression était telle que j’avais juste envie d’en finir. À 32 ans et mon avenir était plus qu’incertain.
Mes relations amoureuses ne tenaient pas le choc de mes émotions et parfois-même j’en rajoutais des couches pour que l’on me laisse seul avec mon « Ours ».
En 2006 j’ai pensé bien faire en prenant RDV au CMP de ma commune. Deux consultations ont suffit pour me diagnostiquer Bipo de type 2.
Ne voulant pas accepter mon sort et une médication à vie. Le CMP m’a tourné le dos.
C’est alors que j’ai plongé dans une profonde dépression pendant 1 an.
J’y suis retourné 1 an après en acceptant d’arrêter le cannabis et d’être soumis au système de santé.
En 2007, les traitements était encore plus expérimentales que maintenant en 2020. Certaines fois, je n’arrivais pas à me retenir et me faisais dessus en pleine rue. D’autres fois je me réveillais en pleine nuit les draps complètement trempés. D’autres fois je ne maitrisais plus mes tremblements. J’avais aussi de fortes migraines pendant plusieurs jours. En ajoutant à cela mes angoisses et périodes interne troubles. Au bout de X changements de posologies et de traitements et surtout voyant que rien ne me stabilisait, je suis sorti de ma cage de cobaye en 2010. J’ai repris ma consommation de cannabis et mes émotions se sont apaisées.
Cela fait maintenant plus de 10 ans que je suis livré à moi-même.
Le système n’accepte pas les brebis galeuse comme moi. Tu acceptes de devenir un camé protégé par le système ou bien tu deviens un pariât.
J’ai choisis mon camps.
Celui de ne pas dépendre de savants fous, nous faisant avaler toutes sortes de pilules tout en sachant que le remède n’existe pas. Il est évident que nous les bipolaires de notre temps, sommes les testeurs à vie de leurs expériences sur nos petits corps fragiles.
Faut-il accepter de rajouter une couche à notre douleur psychique permanente et bien je ne pense pas.
En 2010, j’ai renoncé à ma carte vitale pour ne plus dépendre de quiconque.
En 2012, première TS. Il me restait encore quelques boites de poison alors autant ne pas gâcher comme on dit. Je voulais leur faire comprendre à quel point leur drogue était fatale.
Je me suis écroulé sur le carrelage jusqu’au lendemain dans l’après-midi.
En 2014, deuxième TS. Même procédé que pour la première.
À la suite de çà et en pleine crise d’hypo, je mets sur pieds un projet humanitaire de 3 mois au Nepal.
En 2015, mon projet voit le jour. Je rassemble mes dernières forces et me lance dans une aventure folle et au multiples péripéties.
À mon retour, j’ai fais le choix de changer de mode de vie en hommage au peuple Népalais et opter pour le minimalisme.
Mes choix de vie m’ont amenés à une vie de solitaire. Sans partage.
À ce jour j’en suis à 12 ans de célibat. Peur de partager mes angoisses et mes sauts d’humeur. Je ne sors presque plus.
J’ai la chance d’avoir un travail qui me permet « pour le moment » de m’en sortir financièrement et de finir de payer mes dettes.
Depuis presque 5 mois je suis super down, un rien me met la larme à l’oeil.
Avec cette crise sanitaire qui n’aide pas et mon job en suspend, j’essaie de tenir bon. De faire barrage aux pensées négatives en essayant d’inverser la vapeur. Pas toujours simple à mettre en oeuvre.
Une seule certitude, après le down « yin » vient l’hypomanie « yang ».
Pour le commun des mortels ces énergies se conjugues, forment un tout. Pour nous les bipolaires, tantôt nous sommes blanc et tantôt noir.
Mon seul espoir est qu’un beau jour j’arrive enfin à vaincre cet Ours qui me possède.
Merci pour cette épaule virtuelle et merci de ne pas répondre
Je sais que c'est égoïste de ma part, mais J'avais juste envie de me décharger une bonne fois
Tcheupel
